L’ascendant. Alexandre Postel.

Un jeune homme solitaire de 36 ans, vendeur de téléphones mobiles, apprend le décès de son père dont il s’était éloigné. Retraité, ancien fonctionnaire des impôts, le défunt était un homme sans histoire. Le fils se rend dans la maison paternelle pour organiser les obsèques. Il y découvre une situation impensable. Il prend une mauvaise décision en espérant trouver une explication. Tout va s’enchaîner pour lui comme dans un cauchemar.

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« Son chat- j’étais sûr qu’il en avait un… »

L’auteur

Né en France à Colombes en 1982, Alexandre Postel est un écrivain français et professeur de lettres à Paris. Il a reçu en 2013 le prix Landerneau ainsi que le  Prix Goncourt du premier roman  pour Un homme effacé.

Commentaire

Face à un psychiatre, le narrateur relate comment se sont déroulés pour lui les cinq jours qui ont suivi le décès de son père.

Il tente d’analyser ce qui est arrivé. Cela l’oblige à analyser la relation déficiente qu’il a vécue avec son père.

Ce roman sur la filiation est déroutant. A son insu malgré son éloignement, la filiation rattrape le narrateur. Son isolement ne l’a préparé à ce qu’il allait  découvrir et vivre.

En cas de revers, on a tendance à utiliser les canevas du passé imprimés à notre insu en nous: la filiation fait qu’une part de notre construction personnelle nous échappe.

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 » tout était logique... »

Beaucoup de romans abordent le thème de la filiation souvent douloureuse et évoque la construction résiliente des enfants. Ici , le lecteur est désarçonné  de voir le narrateur sombrer dans un abîme sordide.

Ce roman pose la question de la filiation mais aussi celle de l’impact du décès d’un père devenu pourtant lointain.

En cas de décès d’un parent, se crée toujours un état de déséquilibre pour les enfants. Comment vit-on le décès de parents âgés? Même à l’âge adulte,  la mort reste un traumatisme même si le temps a permis  de « désidéaliser » les parents et de mieux cerner les facettes humaines de son parent. On les apprécie ou elles nous chagrinent… En principe, après le deuil et le chagrin, on s’émancipe  du passé: on retire les bons enseignements pour passer à autre chose.

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Dans ce roman, le narrateur ne se rendait pas compte de la personnalité déviante de son père. Son être vit un véritable cataclysme avec la découverte de l’inhumanité. Une descente aux enfers.

 

 

 

 

 

 

 

 

Une phrase

« … je ne saisis les choses que l’une après l’autre, de manière discontinue comme les diapositives que mes parents projetaient au mur ».

«Chronique de mon crematorium». Caitlin Doughty

Chacun préfère éviter de penser à sa mort.

Très jeune, universitaire, Caitlin Doughty commence à travailler dans un crématorium. Dans cet ouvrage, elle décrit son travail de croque-mort avec réalisme et humour. Son quotidien, c’est de découvrir les corps, en prendre soin dans un moment délicat et affronter des familles très différentes.

Caitlin Doughty incite le lecteur à se poser des questions sur le soin aux défunts et le sens de la mort. Elle partage ses réflexions, en y ajoutant de nombreuses références historiques sur le respect des dépouilles dans le monde.

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« Tout passe. Tout finit. Tout disparaît. Et moi qui m’imaginais devoir vivre pour toujours, qu’est-ce que je deviens? ».

Dernier écrit de Jean d’Ormesson

Auteur

Née en 1984, Caitlin Doughty vit à San à Francisco. Diplômée d’histoire médiévale, elle est entrepreneure en pompes funèbres. Elle défend des pratiques funéraires plus humaines et écologiques. C’est l’objectif qu’elle s’est donné avec son association, «the Order of the Good Death» (L’Ordre de la Bonne Mort).

Commentaire

Dans notre monde contemporain occidental, les morts sont devenus « invisibles ». En raison de la médicalisation de la mort, les enfants ne sont plus confrontés à la réalité de la mort comme jadis.

Il faut bien que quelqu’un s’occupe des défunts. Les dérives américaines n’ont pas encore envahi le monde des pompes funèbres belges. Mais de plus en plus les émotions des familles sont préservées par une prise en charge totale de la personne  décédée. Le défunt est rapidement emporté au crématorium. Il n’y a plus d’ensevelisseuse. Le rite de crémation a été largement adouci pour la vue des familles.

Regarder la mort en face n’est pas facile. Caitlin Doughty livre des réflexions sur le retentissement des suicides, l’embaumement, la crémation, le décès des enfants et montre les failles de notre société. Les anciens rituels apaisants permettaient une mise à distance et comblaient un peu les déchirures de la séparation chez ceux qui restent.

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Par son témoignage concret, direct et professionnel, Caitlin Doughty invite ses lecteurs à ne plus baigner dans une culture du déni de la mort,  à ne pas s’aveugler, à prendre ses dispositions, en bref à réfléchir avant qu’il ne soit trop tard à la question: que voulez-vous faire de votre corps après votre mort?

 

 

 

Marbre. France Renaissance vers 1550.

Musée Louvres-Lens 2013

L’empire du temps sur le monde,

la Fortune tenant le voile et la mort le gouvernail.

Ce livre ne conviendra pas à ceux qui sont très sensibles ou qui refusent l’idée même de leur mortalité.

 Dans «Le Vif», on lisait récemment (2 mars 2018)«Votre dépouille pourrait-elle bientôt servir de compost? »  

Caitlin Doughty a réalisé une intéressante vidéo à ce sujet pour y exprimer son point de vue.

 Une phrase

«C’est la première fois dans l’histoire universelle qu’une civilisation a rompu aussi franchement avec les pratiques funéraires traditionnelles et avec ses croyances sur la mort ».

« Les bottes suédoises » Henning Mankell

Fredrik Welin, 70 ans, médecin à la retraite, vit seul et reclus sur son île de la Baltique. Entre ses baignades matinales dans l’eau glacée et ses échanges sociaux réduits avec les habitants de l’archipel, la vie de Fredrik est tranquille. Une nuit d’automne, sa maison héritée de ses grands-parents est incendiée. Il est soupçonné d’y avoir mis le feu pour escroquer les assurances.

Frederik s’installe dans la vieille caravane de sa fille au fond de son jardin. Il s’interroge: à soixante-dix ans, que lui reste-t-il?

Son penchant amoureux  pour une journaliste locale Lisa Modin et les ennuis de sa fille Louise (40 ans) qui a besoin de lui le maintiennent à flots. Animé par une soif d’affection, il revisite sa vie, tenaillé par le doute, les regrets et la peur face à la mort.

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« J’ai identifié des fragments de câbles, de plombs fondus provenant de mon tableau électrique et un petit objet tordu, noirci qu’ il me semblait vaguement reconnaître  » (page 31 )

L’auteur

Henning Mankell (1948-2015), écrivain suédois, partageait son temps entre la Suède et le Mozambique. Il est l’auteur d’une série policière ayant pour héros l’inspecteur dépressif Kurt Wallander. Mankell a également publié des ouvrages de littérature pour la jeunesse. Publié quelques mois avant sa mort, et suite indépendante de son roman «Les chaussures italiennes»,  «Les bottes suédoises» fut son dernier roman qu’il écrivit alors qu’il se savait condamné.

Commentaire

Dans ce récit, Henning Mankell évoque le maelström* de la vieillesse, avec ce sentiment de la mort qui rôde et ce désir de vivre encore. Les réflexions de l’écrivain sur la solitude, la vieillesse, les relations père/fille et la société sont poignantes. On y décerne sans peine le questionnement d’un auteur confronté aux mêmes affres.

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Le lecteur s’attache malgré tout à ce vieil homme lunatique, ronchon, solitaire, maladroit même si l’intrigue est faible. En proie aux doutes constants, le cadre de vie du vieil homme disparaît en une nuit! Ses souvenirs ne l’aident pas car son parcours de vie n’a pas été lumineux mais terne. Les sentiments confus et contradictoires de Frederik l’amènent à refaire défiler «  les carrefours successifs de sa vie ». 

 

 

Dans ce récit, on retrouve des points communs au substrat de la vieillesse :  

  • L’attachement viscéral au temps subtilement inséré dans la trame de l’histoire (montre, réveil) est pour les personnes âgées une sorte de contenant rassurant qu’elles maintiennent  à tout prix. « L’enjeu du temps… »
  • L’importance de la nature est souvent un réconfort. Elle apporte bien-être et plaisir à Frederik tout en étant  une source d’enseignement. « Quelques oies du Canada tournoyaient dans le ciel gris comme si elles n’arrivaient pas à décider ou était le sud. »
  • L’interrogation concernant les «carrefours successifs de la vie»: certains grands aînés désabusés imaginent ce qu’aurait pu être leur destin, si leur choix à un moment donné de leur vie passée avait été autre. Ouvertement exprimées, ces cogitations sont parfois d’une grande violence pour l’entourage, parfois gommé  de ce passé imaginaire!

Mankell, écrivain, a glissé dans son livre de subtiles allusions à la valeur et au rôle de l’écriture (poème, journaux intimes …) même si « les mots meurent aussi ».

Les paysages sont décrits avec sobriété.

Henning Mankell nous délivre ici son ultime réflexion. Cet ouvrage de fiction est intéressant car il nous apporte aussi un témoignage sur  la vie, son sens, sa finition à travers le regard d’un septuagénaire.

La citation de préface venait de la Chanson de Roland « Il a beaucoup appris, celui qui connut la douleur» et doit, à mon sens, être reliée à la postface. Par cette boucle, nous détenons l’observation majeure de Henning Mankell en fin de vie, toute entière illustrée dans ce livre :

«Puisque la vérité est à jamais provisoire et changeante »

 Une phrase

« Comment allais-je faire pour supporter la réalité de mon propre vieillissement, de ma maison incendiée et de cette impression de vivre au milieu d’un grand vide où personne ne se préoccupait de savoir si je tenais le coup ni même si j’étais encore en vie? Ou alors, si quelqu’un s’en souciait, c’était uniquement pour me soupçonner d’être devenu fou et de jouer avec des allumettes et des bidons d’essence. »

 Les bottes suédoises, Henning Mankell, Seuil, 368 pages, 2016.

 

* Appelé aussi « trou noir de l’océan ». En Norvège, près des îles Lofoten, on constate un effet de vases communicants entre le Vestfjord et la Mer de Norvège quand la marée remonte vers l’Océan Arctique. Le courant s’inverse et de larges courants marins circulaires se forment: c’est le Maelström.

« Le cercle des femmes ». Sophie Brocas

Lia Palin vient d’avoir vingt ans alors que son arrière-grand-mère Alice, 90 ans, s’est éteinte paisiblement. Lia va rejoindre, dans les Landes où se trouve la maison de la défunte, sa mère Agnès, 47 ans, paléontologue, sa grand-mère Sol, tonique septuagénaire et la meilleure amie et confidente d’Alice, Marie, 90 ans. Durant ces quelques jours de deuil, elles mettent de l’ordre dans les affaires de l’aïeule. Lia, la narratrice du récit, découvre des carnets de notes et des lettres témoignant d’un douloureux secret gardé par la défunte pendant 60 ans et qui a ligoté la vie amoureuse des quatre générations de femmes. Que faire de ce secret ?

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«Marie avait sillonné la ville arabo-andalouse, fixé sur la pellicule les arabesques de fer forgé, le labyrinthe des buis et les fontaines chuchotantes de l’Alcazar»

           Séville

L’auteur.

Journaliste française,  Sophie Brocas a entamé une carrière de haut-fonctionnaire dans les ministères et la préfectorale et est devenue conseillère du président de la République, François Hollande. En mars 2017, à 56 ans, elle est la première femme préfet d’Eure-et-Loir. Elle a  écrit Le cercle des femmes (2014) et Camping car.

Commentaire.

Ce roman classique évoque les dégâts occasionnés par le secret entourant la  disparition du mari de l’arrière-grand-mère, Alice. Ce non-dit, pire ces mensonges construits par Alice ont décidé de la fragilité des liaisons amoureuses des femmes de la famille et ont ricoché comme un galet à la surface de chaque génération pour les victimiser.

Nous connaissons bien aujourd’hui les risques de taire nos secrets de famille puisque la psychogénéalogie depuis les années 1970 a montré que les troubles psychologiques d’une personne peuvent être conditionnés à son insu par les traumatismes ou secrets de ses ascendants.

9782260022008.jpgCe qui m’a semblé intéressant dans ce roman, c’est qu’il montre que  le nœud de la difficulté ne réside pas dans la nature de l’évènement initial mais dans le traumatisme vécu par Alice et des choix qu’elle a opérés. La  sève toxique  mensongère instillée par Alice à Sol et puis à Agnès tire son atrocité de l’insistance à maintenir son secret enfoui au détriment du bien-être de sa fille.

La vérité découverte à propos d’une histoire de famille qui émerge est souvent diffusée par étapes. Comme dans ce roman, ce qui a été occulté, percole et s’éclaircit au fil de temps parfois très longs.

En poursuivant par une recherche personnelle la quête de son histoire, Lia brise le cercle vicieux, retrouve son chemin et confiance en ses capacités. Elle peut faire, sans ombre, son album familial. Par contre, sa mère et sa grand-mère ne s’engagent pas dans ce chemin  direct pour une  réécriture de leur vie. Leur vécu est différent.

La plupart d’entre nous avons nos petits secrets, c’est respectable s’ils ne causent pas de souffrance ou de ravage à autrui. Par contre partager naturellement, sans attendre un moment final, toutes les informations qui touchent aux origines ou à l’avenir familial reste souvent la meilleure voie de respect du droit de nos proches.

Nous sommes aussi dépositaires directs ou indirects de secrets d’autres personnes. Si nous sommes des confidents loyaux, nous gardons ce secret jusqu’à l’oublier.

En parler ou pas? Pas si simple de rester passif devant la souffrance d’un tiers impliqué malgré lui. On mesure toute l’ambiguïté de la position de Marie, même après le décès de son amie. La vérité est à manier avec précautions d’autant que le secret n’a souvent plus les habits d’une vérité absolue purificatrice mais s’appuie sur des convictions, un climat d’époque dépassé plutôt que des preuves. Ce sera  grâce à Marie que Lia obtiendra les éléments utiles pour se libérer de sa souffrance injuste.

La vie moderne  plus décomplexée avec moins de tabous, les changements rapides du monde nous imposent de nous adapter rapidement. Cette flexibilité nous rend sans doute moins directement tributaires  aujourd’hui des mystères d’un noyau dur familial et à la fois plus aptes à partager dans la simplicité une parole libérée à propos de la situation traumatisante ressentie par un proche. D’où l’importance pour nous d’être à l’écoute dans ce cas…pour notre bien et celui de nos enfants.

Un passage.

 « J’avais plongé dans le taillis compliqué des non-dits, des craintes, des entraves données en héritage à la naissance.(…) Peut-être était-ce à moi de faire ce travail puisque ma mère avant moi et ma grand-mère avant elle y avaient renoncé. »

« L’héritage de tata Lucie ». Philippe Saimbert.

Quand ils apprennent le décès de leur tante Lucie, les parents de Joseph, 13 ans et narrateur de cette histoire, ne pleurent pas la perte de «la vieille toquée. Ils sont contrariés de sacrifier une partie de leurs vacances. Comme ses parents, tous les oncles et tantes de Joseph n’aimaient pas la défunte et avaient toujours dénigré sa vie désordonnée. Tous tombent de haut à la lecture de son testament: cette vie dissolue lui a permis d’amasser un plantureux pactole. Pour l’obtenir, les clauses du  testament de tante Lucie obligent les neveux et leurs familles à s’installer dans la maison de la défunte, une vieille ferme rustique à Moncaubet dans le Béarn pour mener une chasse au trésor et retrouver dans un délai précis un bijou caché dans la propriété. Celui qui le découvrira, héritera.

Joseph nous raconte cette quête familiale loufoque en livrant ses commentaires d’adolescent sur  les attitudes intéressées et hypocrites de sa famille, avec un certain détachement dans le mesure où les charmes de sa belle cousine ne le laissent pas insensible…

 

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L’auteur.

Ne en 1962 à Pau, Philippe Saimbert est un auteur et scénariste qui emprunte diverses pistes artistiques pour s’exprimer.
Auteur  d’albums de bande dessinée dans des domaines aussi variés que le fantastique, le thriller, la SF, Philippe Saimbert  a publié en 2010 ce roman d’humour en Béarn où il réside et qui s’intitule « L’héritage de tata Lucie » 

Commentaire.

1540-0.jpgTata Lucie, ce n’est pas du tout Tatie Danielle*. C’est même  l’inverse. Tatie Danielle était une vieille dame odieuse, mesquine, menteuse. Ici, rien de cela avec Tata Lucie qui n’a ennuyé personne de son vivant: il y avait  du monde à son enterrement, une majorité d’hommes certes. Post mortem, elle  tente de se venger finement de ses neveux qui l’ont mise à l’écart du cercle familial.

Ce roman rappelle surtout l’exacerbation habituelle des tensions entre les héritiers qui surgissent de détails inattendus. Les cabinets des notaires sont le théâtre quotidien et privilégié de ces déchirements familiaux.  La réussite sociale, la situation conjugale, l’argent,  les résultats scolaires des enfants acquis par certains et pas par d’autres amplifient encore les anciennes rancœurs ou rivalités de jeunesse. L’héritage d’une maison, de bijoux,  de meubles deviennent ainsi l’ultime et dernier bastion à conquérir quand des rivalités fraternelles vivaces subsistent. Dans ce climat passionnel après le décès d’un proche, les mots échangés éloignent encore plus certains héritiers.

Les personnages du roman ont un côté famille Bidochon, sont plaisants ou pas. Ils peuvent faire sourire malgré de multiples disputes ou digressions qui lassent. La description de la campagne profonde est excellente! Le style de Philippe Saimbert est populaire, exubérant avec une verve qui fait songer à Fréderic Dard.

Comme l’humour est  un phénomène singulier qui doit entrer en résonance personnelle, ce livre plaira à certains et pas à d’autres…

Un passage

« Il est vrai qu’une étude de notaire, c’est presque comme une église; on y médite, on se recueille…et on espère beaucoup ».

 *Tatie Danielle est une comédie française écrite par Etienne Chatiliez en 1990

« Décidément je t’assassine » Corinne Hoex.

La narratrice se rend auprès de sa mère, solide octogénaire, passionnée de scrabble et de mots croisés. Cette dame ne lui a jamais témoigné d’affection et va rentrer à l’hôpital. Elle a une tumeur avancée.

Au cours des dernières visites à sa mère qui n’est pas sénile, sa fille va alors tenter de répondre aux exigences de la malade. En vain: aucun lien ne se crée pas malgré l’espoir d’un espace favorable  au changement que pourrait permettre la maladie ou la lucidité. L’état de la malade se dégrade très rapidement: soins intensifs, sonde, ballon gastrique, morphine, décès.

Malgré le trou béant d’affection maternelle dans son identité, la narratrice peut sans doute tourner une page et commencer à exister.

L’auteur.

Corinne Hoex a publié en 2015 « Valets de nuits« . Au cours de trois romans précédents, elle a décrit le  retentissement psychologique de la violence ou de l’indifférence parentale sur un être. Dans « Le grand menu », paru en 2001 ensuite dans « Ma robe n’est pas froissée«  en 2008 et en 2010, avec « Décidément je t’assassine », Corinne Hoex explique méticuleusement  les impacts mortifères  et l’évolution  douloureuse de la narratrice dans ce climat hostile.  

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  « Sinon chaque fois , c’était la chatte, cette grosse chatte rôdeuse … » p. 140

 

Sur la fin de vie.

Même si l’âge ou la maladie peuvent rendent l’éventualité de la mort tangible, personne n’y est préparé d’autant que l’accompagnement de l’agonisant, la mort, les funérailles, le deuil sont actuellement soustraits de la vie quotidienne et confiés aux soins d’experts.

L’issue fatale a longtemps été due au hasard, ou à la fatalité. Actuellement, avec les progrès médicaux, une partie des décès est devenue assez prévisible pour les spécialistes. Même avertie par le médecin de la phase terminale, la narratrice ne comprend pas la portée du propos: mourir reste impensable pour les personnes en bonne santé.

Cette mère qui continue à lutter pour survivre n’entamera pas un vrai dialogue avec sa fille car elle n’a jamais communiqué avec celle-ci. Jusqu’à sa fin et inlassablement, elle maintient sa suprématie naturelle par les apparences de jours normaux avec les mots croisés ou la télévision.

 

Un passage

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« Chaque semaine quand je lui rends visite, mon irruption dans sa chambre insulte sa liberté. Lorsque selon l’usage, je me penche vers elle pour l’embrasser, ses épaules se dressent, sa nuque se raidit, ses lèvres se rétractent, tout son corps se soustrait au venin de mon baiser. » ( p. 75)

 

Décidément je t’assassine. Corinne Hoex. Editions : Les impressions nouvelles. 

« Comment ma femme m’a rendu fou ». Dimitri Verhulst

Pour échapper au rôle qu’il joue dans ce monde et surtout  à l’humeur capricieuse et méchante de sa  femme Monik, Désiré Cordier, bibliothécaire retraité, à la mémoire d’éléphant, décide, à septante-quatre ans, de simuler la maladie d’Alzheimer.  Avec ruse et talent, Désiré se plonge dans ce rôle du dément et parvient à duper tout son entourage. Il jubile et s’amuse des réactions de sorte qu’il plonge de plus en plus dans les  dérives  de la démence, de l’incontinence de l’absence de retenue. Il finit dans un home «Lumière d’hiver» où il retrouve  parmi les pensionnaires un amour de jeunesse Rosa Rozendaal. Plus de retour possible sur ce chemin fou.

L’auteur

Né à Alost en 1972, Dimitri Verhulst, écrivain belge, connaît une enfance chaotique. Il commence sa carrière d’écrivain en 1994, publie en 2000 le roman Niets, niemand en redelijk stil  puis  De verveling van de keeper.  En 2003 paraît le roman Hôtel Problemski. Son roman autobiographique (2006) La Merditude des choses obtient un grand succès et le film qui en est tiré, sera couronné au festival de Cannes en 2009. De intrede van Christus in Brussel (2011) est suivi en 2013 par De laatkomer (2013), traduit en français en 2015 sous le titre Comment ma femme m’a rendu fou. Son dernier roman  Kaddisj voor een kut (2015) évoque les conséquences d’un séjour dans un établissement de la jeunesse.

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 J’ai toujours aimé donner à manger aux oiseaux et aux canards…

Sur le roman

Certes Désiré aurait pu quitter sa femme bien avant ses 74 ans. Le temps a dégradé son couple et les conjoints ne se supportent plus. Ce n’est pas rare.

Le comportement conditionné de Désiré  l’a emmuré dans ce milieu  familial toxique pour lui. Quand il travaillait encore, il pouvait se réfugier dans la lecture ou la musique. Pensionné, il espérait apprécier ses heures de liberté à la maison mais tombe sous la coupe de sa femme. Comme Elsa Triolet l’écrivait à Aragon, Désiré «étouffe de toutes les choses pas dites » et décide d’habiter son existence avec le rôle du dément. Son autre vie commence à 74 ans quand il décide de se délester des habitudes quotidiennes en empruntant un «chemin de dingue».

Outre la dégénérescence  d’un mariage  raté où les reproches et la haine sont arrivés rapidement,  l’auteur Dimitri Verhulst dénonce aussi les conditions de vie dégradantes du home, les méthodes parfois autoritaires des soignants, l’éloignement progressif  des familles, le prix du séjour, la fin de vie en catimini.

L’observation des évolutions du tissu familial, de l’attitude des amis ou anciens collègues évanescents,  des pensionnaires séniles de la maison de retraite est impitoyable mais très proche de la réalité. Hélas.

Face au refus de prendre l’autre tel qu’il est, d’accepter de se positionner face à une difficulté insurmontable humainement, certains empruntent parfois des pistes pathétiques qui vont les détruire.

Malheureusement, à cet âge avancé, on n’a sans doute plus la force de redistribuer les cartes… 

Un passage

 « Les gens de mon âge n’ont besoin ni de Facebook ni d’un autre truc Internet socialisant pour tromper la solitude, non, nous nous rencontrons dans la vie réelle avec une cruelle régularité aux enterrements et ce faisant entretenons de façon naturelle nos contacts avec un monde extérieur qui se rétrécit »

Publié en français sous le titre Comment ma femme m’a rendu fou,  Dimitri Verhulst. Paris, Éditions Denoël, coll. Denoël & d’ailleurs, 2015, 250 p. Trad. du néerlandais par Danielle Losman.

Comment braquer une banque sans perdre son dentier. Catharina Ingelman-Sundberg

Cinq octogénaires Märtha, Stina, Anna-Greta, le Génie et le Râteau dépérissent dans une maison de retraite de Stockholm: les repas minables, la discipline stérile et le nombre de pilules distribuées les révoltent tellement qu’ils décident de fuir ce mouroir pour bénéficier des qualités supposées d’un univers carcéral vu dans un reportage à la télévision. Pour atteindre ce but, ils doivent commettre un forfait. Ce sera un vol de tableaux de Monet et Renoir au musée de Stockholm avec demande de rançon. Face à ce casse, la police s’interroge  mais comment  soupçonner d’honorables vieillards ?

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   « Il vaut mieux oser un coup de dés que de disparaître comme une flamme qui s’éteint ».

(Vers d’un poème de l’écrivain suédois, Carl Gustaf Verner von Heidenstam, Prix Nobel de littérature 1916)

L’auteur

Née en 1948, Catharina Ingelman-Sundberg est une auteure suédoise très populaire.
Elle a participé à plusieurs explorations archéologiques à la recherche de drakkars ensevelis. Après plusieurs romans historiques, elle décrit ici le monde des seniors dans une série qui commence par  «Comment braquer une banque sans perdre son dentier» (2014) suivi par «Le gang des dentiers fait sauter la banque» (2015), où l’on retrouve les mêmes retraités farfelus. Un troisième volet de la série est annoncé.


Commentaire

Nous replongeons ici  dans l’humour décapant de la vague  des écrivains scandinaves  entraînes  par Arto Paasilinna, Jørn Riel, Erlend Loe  ou Jonas Jonasson. Ces auteurs nous emportent dans leurs récits  picaresques mettant en scène des êtres sympathiques qui vivent des  aventures extravagantes. Leurs personnages sont en marge du politiquement correct et du vraisemblable mais ce décalage permet aux écrivains de peindre en contraste les problèmes typiques de notre société et ses dérives actuelles.

Dans ce polar cocasse «Comment braquer une banque sans perdre son dentier», rien ne se déroule comme prévu mais on se laisse entraîner sans ciller dans cette agréable lecture. 

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Madame Joseph Le Coeur en 1866,mère du peintre Jules Le Coeur, ami de Renoir.

 Auguste Renoir

(Oeuvre du Musée d’ Orsay à Paris, exposée en 2014 à la fondation Pierre Gianadda à Martigny en Suisse)

 

Commenter un roman sur le monde des seniors reste toujours un plaisir tant chaque écrivain apporte au grand tableau de la vieillesse ses remarques  pertinentes et lève un coin du voile pour les néophytes. Si l’auteure nous raconte en filigrane la prise en charge désastreuse des personnes âgées en Suède, elle décrit  aussi deux cartes magiques dont jouent certains  seniors. Les astuces employées par ces seniors rebelles qui ont réalisé que la vieillesse a aussi des avantages et qu’elle suscite l’indulgence, la sympathie, le sens du devoir des autres endormant souvent toute  méfiance.

  • Berner les autres est donc un plaisir que s’offrent certains seniors assez vifs pour exploiter notre aveuglement et qui rient sous cape, dès que nous avons le dos tourné. Ainsi, Josianne me raconte qu’elle circule dans le quartier sans canne mais prend une canne dans les transports en commun pour avoir sa place. Albert n’entend plus que les coups de sonnette qui l’intéressent et jamais les questions qui le dérangent.
  • Pour les seniors, l’union fait aussi leur force. Catharina Ingelman-Sundberg illustre dans ce roman que les lacunes de mobilité individuelle, les déficiences de ses retraités sont judicieusement compensées par les autres vieillards. Les personnes âgées peuvent grâce à leur expérience et connivence compenser ensemble leurs faiblesses pour mener à bien un  Leur réseau d’amis n’a rien de virtuel….et les seniors ont le temps d’observer les habitudes et comportements de l’entourage et de bâtir un plan avec persévérance.

La mystification et l’union des pairs sont les armes employées par les seniors qui entrent en résistance et veulent sauvegarder leur indépendance ou masquer leurs premiers signes de défaillances.

 

 Une phrase

« Une vieille dame en déambulateur peut faire beaucoup de choses que les autres ne peuvent pas se permettre. »

Comment braquer une banque sans perdre son dentier de Catharina INGELMAN-SUNDBERG (Auteur), Hélène HERVIEU (Traduction). Fleuve éditions (2014). 432 pages. 

Chère mère détestée. Madeleine Melquiond.

A 80 ans, Paulette était pétulante, distinguée. Quand les premiers signes de la maladie d’Alzheimer se dessinent, ils ne sont pas identifiés tout de suite par sa fille Madeleine. L’aura, le caractère de diva de sa mère bluffent un certain temps l’entourage.

Bien vite, Paulette reçoit de moins en moins d’invitations. Il ne reste donc que Madeleine pour s’occuper de sa mère alors que celle-ci a toujours été vacharde et blessante avec elle. Par une sorte de pacte immémorial, Madeleine Melquiond  raconte pourquoi elle prend soin de Paulette, sa mère malade d’Alzheimer. Elle devient petit à petit une fille coopérative. Tout en sachant qu’aucune réparation, ni justification ne pourront plus venir de sa mère nonagénaire, Madeleine est là, chaque semaine, près d’elle dans sa maison de repos. 

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L’auteur

Née en 1945, Madeleine Melquiond vit dans la Drôme. Après une carrière de journaliste, elle publie en 2007 «Longtemps j’ai vécu avec une bouteille», en 2013 «On n’est pas sérieux quand on a soixante ans» et en 2014 «Chère mère détestée».

Commentaire.

Ce témoignage, Madeleine Melquiond a longtemps hésité à l’écrire: «Je me suis dit: si j’attends sa mort, je ne ferai plus le même livre». C’est exact.

Parler de la famille, de ce qui se joue au niveau des soins à certains grands aînés est une tâche ardue et délicate tant les ressentis peuvent être différents. Ce livre âpre brise un tabou et livre une vérité sur le soin à ces aînés caractériels atteints de troubles neurologiques majeurs.Le témoignage n’est ni une jérémiade ni un dénigrement ni un lavage de linge sale comme pourrait laisser l’imaginer la photo de couverture.

Le récit de la démarche d’aide positive effectuée montre l’évolution de l’état d’esprit des deux parties. Il réconfortera beaucoup d’adultes excédés, impliqués dans cette situation très difficile émotionnellement de  devoir prendre soin de celui ou celle qui ne fut pas un parent aimant ou à la hauteur. Que d’autres personnes aient connu les mêmes dilemmes n’allègera pas leur fardeau mais pourrait les aider.

Ce témoignage est un parfait écho du roman de Corinne Hoex : Ma robe n’est pas froissée.

Chacun de nous a son idéal du bon parent mais nos parents ne nous offrent pas toujours ce cadre rêvé et tutélaire d’affection ou d’attention. Avec la maturité, nous finissons par appréhender nous-mêmes la difficulté et l’ampleur du défi du rôle parental. Cette compréhension peut amener l’indulgence et une forme d’apaisement dans les relations mutuelles. Prendre soin de ses parents âgés défaillants paraît une évidence.

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Quand l’histoire avec les parents a été toxique ou très destructrice, l’enfant ne s’est pas senti aimé. Cette carence est indélébile. Très peu d’enfants adultes se brouillent, ou coupent réellement les ponts avec leurs parents: ils maintiennent souvent une relation artificielle de normalité. Prendre soin de ses parents malades devient une épreuve à assumer.

En cas de problème de sénilité d’un parent toxique ou «difficile»*, il est très pénible pour l’enfant adulte de replonger dans un lien concret de dépendance inversée.

 

 

 

Beaucoup de facteurs alourdissent la prise en charge:

  • Les enfants sont dans la soixantaine, avec leurs soucis de travail, de retraite, de santé, leurs enfants et petits-enfants. Les cellules familiales «traditionnelles» ou les relations intergénérationnelles peuvent être fragiles ou quasi inexistantes.
  • Souvent l’adulte aidant n’a pas pu partager l’histoire de ce lien premier raté avec le parent non aimant et l’entourage actuel ne comprend pas l’attitude « tempérée » de l’aidant.
  • Le soin aux aînés est oppressant pour un enfant unique car la mauvaise humeur du senior ne se dilue pas sur plusieurs épaules qui peuvent se relayer.
  • En vieillissant, un parent devient socialement une icône qu’il serait indécent publiquement de faire choir de son piédestal. Certains seniors prennent vite conscience de ce statut extérieur très intéressant. Comme Paulette au restaurant, ils usent et abusent parfois de ce privilège.
  • Certaines maladies neurologiques liées au grand âge se tapissent encore mieux dans les traits d’une personne naturellement ronchonne, tyrannique, égoïste ou blessante. La maladie détectée, elle cristallise les défauts de la personne ou la désinhibe. Inutile d’ajouter que les  nouvelles piques, agressions du parent sont douloureuses à revivre pour l’aidant.
  • La durée de prise en charge peut maintenant s’étaler sur plus d’une dizaine d’années.

Il n’en reste pas moins qu’un autre type de lien, très différent de la relation ancienne tumultueuse, peut naître malgré tous ces écueils et malgré la maladie: le senior en difficulté et l’enfant aidant, avec le temps, peuvent parfois non s’apprivoiser mais bâtir une relation fonctionnelle satisfaisante.

La phrase

«Elle reste ma mère, je reste sa fille. Toute notre vie a été un rendez-vous manqué. Mais… je suis quand même au rendez-vous».

Chère mère détestée, Madeleine Melquiond, 203 pages. Editions: Max Milo  Collection: essais documents

*Comme pudiquement  dit par le personnel des homes ou hôpitaux. 

Petites scènes capitales. Sylvie Germain

Lili n’a pas connu sa mère. Elle avait onze mois quand celle-ci a quitté le foyer conjugal. Son père s’est remarié avec Viviane qui avait déjà quatre enfants. Lili assiste en spectatrice aux problèmes et drames de la famille recomposée. L’attitude distante de son père l’isole et ne l’aide pas à trouver sa place. Avec le temps, les enfants quittent le foyer. Lili, elle, dérive, rejoint une communauté, connaît des amours passagères, abandonne ses études ou projets. Son chemin, miné par le doute,  reste une quête permanente de sens.

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« Elle sort du placard ses confitures préférées, celles aux prunes et celle aux abricots agrémentée d’amandes » p.49

L’auteur

Née en 1954 en France, Sylvie Germain a suivi des études de philosophie. Elle écrit des contes et des nouvelles et publie ensuite « Le Livre des Nuits » suivi de « Nuit-d’Ambre« , une saga familiale qui reçoit six prix. D’autres romans suivent « Jours de colère » qui obtient le prix Fémina, « Immensités », « La Chanson des Mal-aimants ».

En 2013, Sylvie Germain a été élue à l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, au siège de Dominique Rolin.

Commentaire

Roman  - Copie.jpgCe livre « Petites scènes capitales » raconte dans des chapitres courts et denses les souvenirs d’enfance et les accidents de la vie familiale de Lili.

Lili qui a tant besoin de reconnaissance comprend vite qu’elle n’occupe une place très secondaire dans le cœur de son père même si elle est sa seule fille biologique.

Grandir sans maman et ensuite perdre sa grand-mère a créé en elle un vide immense qu’aucun membre de la nouvelle famille ne comblera.

Comme dans « Ce parfait ciel bleu » de Xavier de Moulins, la famille est un noyau sans cesse agité qui se construit, se déconstruit et où le père ne s’y retrouve manifestement plus.

Chaque famille traverse ses épreuves dans un cycle d’évolution permanente mais ici le mécanisme de fonctionnement familial des Bérégance finit par se rompre et renvoie chacun des membres à ses fêlures. Chacun devra trouver seul sa voie de secours.

Les angles durs de cette histoire, l’onde de tristesse permanente sont atténués par un style littéraire délicat et recherché. Les descriptions poétiques de cygnes, de paysages, les énumérations de synonymes charmeront ceux qui aiment le balancement des phrases et les amoureux du dictionnaire.

L’écriture de ce roman contribue à instiller une pudeur dans l’émotion comme le temps pourrait gommer l’âpreté d’un passé douloureux.

 

Une phrase

au sujet de la vieillesse de Gabriel ( le père reconnaît à peine sa fille…)

« ….c’est le temps qui bouge en lui, il se meut dans sa chair, dans son esprit, ainsi qu’un vent ténu, d’une douceur érosive, il y tourne en lentes spires, disloquant les strates du passé, brisant l’écorce du présent et la pulvérisant »

page 223. »Petites scènes capitales »  Sylvie Germain. Editeur Albin Michel.