Cinq octogénaires Märtha, Stina, Anna-Greta, le Génie et le Râteau dépérissent dans une maison de retraite de Stockholm: les repas minables, la discipline stérile et le nombre de pilules distribuées les révoltent tellement qu’ils décident de fuir ce mouroir pour bénéficier des qualités supposées d’un univers carcéral vu dans un reportage à la télévision. Pour atteindre ce but, ils doivent commettre un forfait. Ce sera un vol de tableaux de Monet et Renoir au musée de Stockholm avec demande de rançon. Face à ce casse, la police s’interroge mais comment soupçonner d’honorables vieillards ?
« Il vaut mieux oser un coup de dés que de disparaître comme une flamme qui s’éteint ».
(Vers d’un poème de l’écrivain suédois, Carl Gustaf Verner von Heidenstam, Prix Nobel de littérature 1916)
L’auteur
Née en 1948, Catharina Ingelman-Sundberg est une auteure suédoise très populaire.
Elle a participé à plusieurs explorations archéologiques à la recherche de drakkars ensevelis. Après plusieurs romans historiques, elle décrit ici le monde des seniors dans une série qui commence par «Comment braquer une banque sans perdre son dentier» (2014) suivi par «Le gang des dentiers fait sauter la banque» (2015), où l’on retrouve les mêmes retraités farfelus. Un troisième volet de la série est annoncé.
Commentaire
Nous replongeons ici dans l’humour décapant de la vague des écrivains scandinaves entraînes par Arto Paasilinna, Jørn Riel, Erlend Loe ou Jonas Jonasson. Ces auteurs nous emportent dans leurs récits picaresques mettant en scène des êtres sympathiques qui vivent des aventures extravagantes. Leurs personnages sont en marge du politiquement correct et du vraisemblable mais ce décalage permet aux écrivains de peindre en contraste les problèmes typiques de notre société et ses dérives actuelles.
Dans ce polar cocasse «Comment braquer une banque sans perdre son dentier», rien ne se déroule comme prévu mais on se laisse entraîner sans ciller dans cette agréable lecture.
Madame Joseph Le Coeur en 1866,mère du peintre Jules Le Coeur, ami de Renoir.
Auguste Renoir
(Oeuvre du Musée d’ Orsay à Paris, exposée en 2014 à la fondation Pierre Gianadda à Martigny en Suisse)
Commenter un roman sur le monde des seniors reste toujours un plaisir tant chaque écrivain apporte au grand tableau de la vieillesse ses remarques pertinentes et lève un coin du voile pour les néophytes. Si l’auteure nous raconte en filigrane la prise en charge désastreuse des personnes âgées en Suède, elle décrit aussi deux cartes magiques dont jouent certains seniors. Les astuces employées par ces seniors rebelles qui ont réalisé que la vieillesse a aussi des avantages et qu’elle suscite l’indulgence, la sympathie, le sens du devoir des autres endormant souvent toute méfiance.
- Berner les autres est donc un plaisir que s’offrent certains seniors assez vifs pour exploiter notre aveuglement et qui rient sous cape, dès que nous avons le dos tourné. Ainsi, Josianne me raconte qu’elle circule dans le quartier sans canne mais prend une canne dans les transports en commun pour avoir sa place. Albert n’entend plus que les coups de sonnette qui l’intéressent et jamais les questions qui le dérangent.
- Pour les seniors, l’union fait aussi leur force. Catharina Ingelman-Sundberg illustre dans ce roman que les lacunes de mobilité individuelle, les déficiences de ses retraités sont judicieusement compensées par les autres vieillards. Les personnes âgées peuvent grâce à leur expérience et connivence compenser ensemble leurs faiblesses pour mener à bien un Leur réseau d’amis n’a rien de virtuel….et les seniors ont le temps d’observer les habitudes et comportements de l’entourage et de bâtir un plan avec persévérance.
La mystification et l’union des pairs sont les armes employées par les seniors qui entrent en résistance et veulent sauvegarder leur indépendance ou masquer leurs premiers signes de défaillances.
Une phrase
« Une vieille dame en déambulateur peut faire beaucoup de choses que les autres ne peuvent pas se permettre. »