Assurance chantier, un parapluie.

Entamer un chantier de construction ou de rénovation est une grande aventure pour un particulier: les montants financiers engagés sont importants et les intervenants nombreux.

Au cours de l’exécution, des incidents peuvent survenir. Déterminer les responsabilités sans retarder le chantier est quasi impossible.

Pour vous prémunir des « intempéries » d’une construction ou d’une rénovation, et préserver votre tranquillité de maître de l’ouvrage, il vous est possible de souscrire comme le font les entrepreneurs consciencieux, une assurance Tous Risques Chantier (TRC).                                                         

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 « Que ton parapluie soit prêt avant qu’il pleuve »

Proverbe indonésien.

L’assurance TRC peut, en fonction des clauses édictées par les diverses compagnies d’assurances, couvrir deux risques majeurs:

  • Le dommage occasionné à un chantier ainsi qu’aux matériaux sur le chantier par les forces de la nature, un effondrement, un incendie ou une explosion, un vol ou un acte de vandalisme, …
  • Votre responsabilité civile de maitre d’ouvrage liée à ces travaux de construction, tant pour les lésions corporelles que les dommages matériels et immatériels occasionnés par les travaux. Vous-même en tant que particulier, pourriez, en effet, être considéré responsable d’un dommage à un tiers, même si vous n’avez personnellement pas commis la moindre faute (ex: un passant est blessé par une chute de matériau). Vous êtes alors couvert via cette assurance TRC contre les dommages que vous occasionnez à des tiers ou à leurs biens (aux habitations voisines (fissures,…) ou pour des troubles de voisinage (bruit,…) au cours de vos travaux de construction ou de rénovation.

Peu importe qui portera la responsabilité finale de ces dommages. C’est l’aspect le plus intéressant de cette assurance « parapluie« , qui évite d’interrompre le chantier à cause de la détermination de responsabilité d’un dommage ou d’un vol de matériel.

La prime varie selon le risque couvert; elle évoluera souvent entre 800 à 1000 €.

  • La première étape avant le commencement de votre chantier consistera pour vous, alors à vérifier:
    • les assurances existantes des professionnels avec qui vous travaillerez. Si votre entrepreneur a conclu une assurance TRC pour votre chantier, demandez précisément le numéro de ce contrat, le nom de l’assureur et les conditions générales du contrat de manière à permettre à votre propre assureur d’analyser si vous êtes aussi couvert personnellement.* En effet, pour travailler au logement d’un simple particulier, l’entrepreneur souvent ne souscrit pas une assurance TRC et n’assure donc pas sa responsabilité contractuelle envers le maître de l’ouvrage, ni par conséquent la responsabilité du maître de l’ouvrage vis-à-vis des tiers.
    • votre propre assurance incendie actuelle et la poursuite de sa couverture ou non en cas de travaux d’ampleur ou des possibilités d’extensions de votre police par d’autres garanties.**

 

  • Si vous devez ensuite souscrire un contrat TRC, veillez à y songer à temps: le contrat TRC doit être souscrit avant le début des travaux pour sortir ses effets. L’aide d’un courtier vous sera utile car, suivant les compagnies, l’assurance TRC présente des garanties très variables et modulables. Un coût de franchise demeure cependant à charge de l’assuré en cas de sinistre.

Outre la franchise à assumer et sauf exception, sachez que votre protection ne sera jamais totale même avec votre assurance TCR.

Ce parapluie vous préserve des pluies mais pas des cataclysmes!

En effet,

  • La faillite de l’entrepreneur ne relève pas de cette assurance.
  • Les accidents de chantier qui vous impacteraient, ou vos proches ou vos amis (qui vous aideront peut-être dans certaines phases des travaux sur le chantier) ne sont pas couverts pour les dommages corporels subis, par la plupart des contrats TRC examinés.
  • Le vol des outils, au contraire des matériaux (briques, radiateurs, châssis…), n’est pas dédommagé dans ce cadre. Si vous travaillez en tant que particulier sur votre propre chantier, ramenez autant que possible chez vous, vos outils susceptibles d’être volés.
  • La durée de couverture de l’assurance TCR est limitée et s’étend du début des travaux jusqu’à la réception provisoire d’une partie ou de l’ensemble de l’ouvrage. Prévoir une clause de prolongation pour couvrir les retards de chantier est judicieux. ***
  • Toute malfaçon ou non-conformité des travaux aux plans architecturaux n’est pas couverte dans ce cadre d’assurance TRC, sauf clause d’extension ou exception. Il est intéressant de vérifier préalablement à tout problème grave avec un intervenant du chantier, si vous disposez ou non d’une aide juridique via un autre contrat d’assurance, par exemple une protection juridique.****

*Demander simplement à un entrepreneur « s’il est bien assuré » ne sert à rien dans ce cas précis: sa réponse sera positive car il a sa responsabilité civile professionnelle.

** AG Insurance propose à ses assurés un pack pour les dommages liés à une construction ou une rénovation, pack qui complète l’assurance incendie.

*** Si vous craignez des risques importants au bâtiment après cette période, il existe  une autre couverture lassurance Responsabilité décennale qui peut s’ajouter  à l’assurance TRC

****C’est rarement le cas. Or, dans la construction, il est important pour la victime lésée de réagir avec célérité, rigueur et respect des formes. Si le préjudice s’annonce important, des avocats en droit de la construction pourraient assister la victime dans les phases de négociation amiable ou du contentieux.

Quelles balises pour la robotique? (2)

Après les questions éthiques et juridiques liés au rôle des robots, soyons conscients que l’intégration des robots dans notre quotidien aura une répercussion sur  notre société humaine, nos valeurs  et le fonctionnement de nos rapports humains.

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                                                                           Strasbourg.

La place des hommes et des robots dans nos sociétés modernes et le niveau de collaboration acceptable de cette puissante aide technologique devront être établis.

Cette question primordiale  au niveau sociétal  a été posée par le philosophe Mark Hunyadi (1):

«Voulons-nous qu’une grande partie de nos interactions se passe avec des androïdes ?».

Irons-nous  dès lors vers une société qui se déshumanisera?

Jusqu’à présent, les experts commerciaux ont décidé pour nous. Ils jouent à la fois sur l’aspect innovation et les atouts financiers de ces collaborateurs robotisés, jamais « malades » (quoique parfois … en panne).

Les risques éventuels pour le devenir du potentiel humain sont totalement minimisés. Selon les spécialistes, la plupart d’entre nous n’appréhende déjà plus l’enchevêtrement et les implications  de cette euphorie technologique. D’autre part, la vitesse de l’innovation est devenue le gage de succès des produits ou programmes mis sur le marché, sans optimisation ultime. Notre adhésion à cette frénésie de nouveautés informatiques a même normalisé les bugs de ces applications. Enfin, l’opacité des programmes des entreprises, au service d’intérêts privés, masque au public les béances des modèles robotiques (comme le danger de prise de contrôle du robot ou de son hackage par des tiers) et neutralise notre questionnement.

Nous sommes déjà dans « la vie algorithmique »(2) comme la définit Eric Sadin « qui se caractérise par l’application d’une raison numérique à l’ensemble des gestes du quotidien de l’homme moderne« .

Eric Sadin estime « impératif d’ériger des contre-pouvoirs capables de contenir la puissance du technopouvoir« .

Cette riposte est-elle encore possible ? Oui, si nous ne nous assoupissons pas et réagissons avec des outils suffisamment performants. Une page semble se tourner dans la Silicon Valley.

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En attendant, projetons- nous un peu dans le futur proche. Des robots aideront nos enfants à faire leurs devoirs au lieu de nous, parents. Et, devenus, pourquoi pas, au service de nos enfants, ces robots  feront les devoirs à leur place. En peu de temps, nous serons tous abêtis ou asservis (3).

Pire, le développement de nos capacités cognitives humaines sera affecté si nous utilisons moins notre capital de base ou n’apprenons plus à l’utiliser.

Continuons notre projection. Ces mêmes robots interconnectés rendront visite (virtuelle) à notre place à notre papy placé dans un home sous surveillance électronique (d’un robot « collègue ») «puisque l’interaction est bonne» et que «l’humanoïde a cette neutralité bienveillante et rassurante». Ils nous enverront évidemment un rapport numérique complet de leurs constatations, avec en option, photos et vidéos, immédiatement stockées dans notre cloud personnel.

Erich Fromm (4)  disait « Le danger dans le passé était que les hommes deviennent des esclaves. Le danger dans le futur est qu’ils deviennent des robots ».

Le pire dans le futur ne serait-il pas que les hommes deviennent esclaves des robots?

Une tyrannie technologique (5) ?

Est-ce bien ainsi que nous voulons évoluer et vieillir?

 

1. « Je ne suis pas contre les robots. Le mal moral ne consiste pas dans la technologie ou les robots. Mais dans le fait que ces évolutions se font sans réflexion, sans qu’on y prenne garde, sans qu’on se rende compte de ce qui est en jeu. L’irréflexion, la politique du fait accompli, voilà le mal moral« 

2. « La vie algorithmique : Critique de la raison numérique » de Éric Sadin

3. « Beaucoup de cadres d’entreprises de Google, Yahoo, Apple et eBay semblent en effet avoir inscrit leurs enfants à la Waldorf School dont la philosophie ne laisse aucune place à la technologie qui selon la direction, représente une menace pour la créativité, le comportement social et la concentration des élèves »

4. Psychanalyste humaniste américain (1900-1980)

5. Le Soir du 2 octobre 2017 page 26. « Quand la réalité dépasse la fiction »

Quelles balises pour la robotique? (1)

Nos capacités cognitives et physiques sont humainement limitées. Certains calculs scientifiques demandent un temps considérable qu’un homme normal n’a pas. Les ordinateurs et robots nous permettent indéniablement d’avancer dans de nombreux domaines de pointe.

Dans les perspectives immédiates, par exemple les soins des seniors dépendants, la robotique comblera-t-elle le manque de personnel  ou va-t-on vers une société déshumanisée? La question se pose. Les aspects éthiques, juridiques et sociétaux liés à l’apparition des robots font déjà l’objet de débats.

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Splendide coucher de soleil à La Panne (Mer du Nord) Juillet 2017

 

Isaac Asimov parle de « robotique », pour la première fois, dans sa nouvelle « Le menteur » publiée en 1941. Le contexte démographique du boom du vieillissement exploité par la Silver Economie ravive toutes les questions de cet écrivain précurseur.

  • Les questions éthiques? Quelle place donnerons-nous aux robots? Le robot peut-il s’implanter partout, être autonome? Un robot peut-il refuser une mission? Les robots sont-ils capables d’avoir leur morale ? Permettra-t-on aux robots  de s’auto-détruire ou de se reproduire?  Pour gérer les interactions avec les robots dits intelligents, la Corée du Sud  s’est dotée en 2007 d’une Charte éthique.
  • Au niveau juridique, quel sera le statut des robots? Quelle sera leur responsabilité en cas de dommage, de dérapage? Faut-il des règles définissant un cadre d’utilisation des robots? Y aura-t-il des balises aux logiques conquérantes des robots?

Isaac Asimov avait formulé dès 1940, ses trois lois de la robotique que les lecteurs de science-fiction connaissent:

1. Un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger.

2. Un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi.

3. Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la première ou la seconde loi.

Andra Keay, qui dirige la  Silicon Valley Robotics a énoncé cinq autres lois informelles:

   1. Les robots ne doivent pas être utilisés comme des armes.

   2. Les robots doivent se conformer aux lois, notamment celles sur la protection de la vie privée.

   3. Les robots sont des produits : en tant que tels, ils doivent être sûrs, fiables et donner une image exacte de leurs capacités.

   4. Les robots sont des objets manufacturés: l’illusion créée ne doit pas être utilisée pour tromper les utilisateurs les plus vulnérables.

  5. Il doit être possible de connaître le responsable de chaque robot.

Dans un rapport débattu et voté en 2017, les députés européens ont demandé un cadre légal à l’échelle européenne en matière de robotique. Mady Delvaux, députée démocrate socialiste luxembourgeoise en charge de ce dossier évoque déjà ces trois points:

a) la possibilité de conférer aux robots une personnalité électronique,  limitée comme pour les entreprises,

b) la recherche d’un solution pour la question de la responsabilité civile en cas de dommage,

c) une charte pour empêcher la dépendance émotionnelle des personnes à leurs robots.  

Souvent traités comme de simples objets high-tech, l’octroi, à un robot, d’une personnalité juridique, même limitée, engendrera des conséquences. Après avoir précisé le volet des devoirs  du robot, apparaîtra le problème de ses droits dans la société humaine. Certains experts voient dans ces machines un ersatz d’humanité. Cet anthropomorphisme* les conduit logiquement à s’émouvoir déjà d’abus, de comportements déviants ou assimilables à de la maltraitance des humains sur des robots.

En France existe l’Association du droit des robots fondée par l’avocat Alain Bensoussan. L’objectif, pour cet avocat, ne serait pas tant de préserver une sensibilité robotique que de respecter l’empathie humaine.

L’interdiction de la maltraitance  pourrait aussi être vue comme une façon de préserver les valeurs morales de nos sociétés puisque les hommes doivent toujours être régulés dans leurs instincts par des normes (contrairement aux robots !) pour maintenir une société civilisée.

La mise en place d’une telle protection juridique pour les robots se construirait facilement dans le mesure où un exemple peut être puisé dans nos lois sur le bien-être animal **et dans d’autres législations particulières.

À supposer que de tels droits émergent pour les robots, il faudra définir un champ d’application. Quels seront les robots concernés et ceux qui seront aptes à avoir cette dignité et cette protection juridique? Les robots qui ont une apparence humaine ou animale ou tous les robots ? Un robot chirurgien, un robot compagnon, un robot grille-pain, une voiture « autonome », une tondeuse à gazon…

( A suivre)

 

* « action qui consiste à donner à un animal ou une chose, une représentation humaine , un comportement  ou une qualité humaine ». Dès que quelque chose bouge, nous avons une tendance instinctive à y associer la vie.  Si l’objet est  en plus conçu pour ressembler aux humains, l’association pour nous est encore plus rapide. Ce phénomène est avancé au Japon où il est courant d’assister aux funérailles de robots d’entreprise « qui ont terminé leur vie ».

 ** « Nul ne peut se livrer, sauf pour des raisons de force majeure, à des actes non visés par la présente loi, qui ont pour conséquence de faire périr sans nécessité un animal ou de lui causer sans nécessité des lésions, mutilations, douleurs ou souffrances ». Article 1. Loi relative à la protection et au bien-être des animaux. 14 août 1986

Assurance responsabilité civile du résident en maison de repos.

Je remets ici un peu de lumière dans le domaine de l’assurance du résident en maison de repos. C’est aussi une des clés de sa tranquillité.

L’assurance responsabilité civile ou RC familiale reste une couverture facultative en Belgique. Elle couvre votre responsabilité civile et celle des membres de votre famille pour les dommages corporels ou matériels que vous causez à un tiers. Les conditions générales du contrat varient en fonction de la compagnie d’assurances.

Lors de l’étape importante d’une entrée en maison de repos, on estime parfois à tort que cette assurance n’est plus utile pour le résident. La maison de repos a sa propre assurance responsabilité civile et est tenue de prendre les précautions nécessaires pour éviter les accidents avec leurs résidents. Or, l’objet de l’assurance de responsabilité civile de la maison de repos est très différent car y est visée la réparation des fautes commises par l’organisme et l’ensemble du personnel dans l’exercice de leurs activités et non les fautes dommageables des pensionnaires.

Le senior pensionnaire reste donc toujours civilement responsable de ses propres fautes. Dans son nouveau milieu de vie dense, où les accidents et chutes sont fréquents, le résident peut en blesser un autre, casser les lunettes de son voisin, provoquer la chute d’une personne en manipulant son fauteuil roulant. Avec des personnes vulnérables, une peccadille peut avoir des conséquences catastrophiques.

Certaines maisons de repos acceptant les animaux, la responsabilité du maître est engagée si un dommage est causé à un tiers par l’animal.

Enfin lors des sorties à l’extérieur, comme piéton notamment, il peut provoquer un accident et la responsabilité du résident reste engagée normalement pour les actes de la vie. 

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 “Les affaires interminables sont celles où il n’y a pas de difficultés.”

 Napoléon Bonaparte

Si vous souhaitez que le séjour en maison de repos de vos proches soit sans souci, maintenez leur assurance responsabilité civile en vérifiant qu’elle s’applique au nouveau milieu de vie (maison de repos). Prenez la précaution de notifier l’information par écrit à son assureur.

J’ajoute, si nous voulons être complets, que «la protection juridique», option souvent comprise dans cette assurance, doit aussi être incluse. Ce volet est essentiel pour le senior fautif, qui verra ses intérêts juridiques et ses droits directement préservés par son assurance car un sinistre en maison de repos évolue rapidement en un conflit juridique portant sur la détermination de la responsabilité.

Mon expérience m’a prouvé que beaucoup de seniors victimes d’un dommage mineur et leur famille sont moins enclins à emprunter une voie amiable ou négociée. Animés par une quête ultime de reconnaissance ou d’affirmation de soi, ils ne se résignent pas et préférèrent livrer la bataille forcenée de Waterloo contre le pensionnaire fautif affaibli, même pour un résultat dérisoire.

Aspects particuliers de la relation emphytéotique et construction d’un appartement. (3/3)

Si un particulier envisage d’investir en acquérant un appartement lié à un bail emphytéotique de terrain qui ne confère qu’un droit limité dans le temps, cela s’avèrera l’écueil fondamental de son projet. 

Imaginons Arthur, 30 ans, qui achète un appartement en emphytéose partielle pour le transmettre à sa petite Lily qui vient de naître. Vu la longévité actuelle, on peut être certain que la fille de Lily sera confrontée à la fin du bail emphytéotique et pourrait perdre l’appartement. Ce n’est sans doute pas ce à quoi avait pensé Arthur en investissant…en bon père de famille.

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Deauville. Cryptogram One. Karl Lagasse. 2012

Voici divers aspects à bien « décrypter »:

  • Si le tréfoncier n’appartient pas à la puissance publique mue par l’intérêt de la collectivité et qu’il s’agit d’une société commerciale par exemple, son intérêt premier sera avant tout de tirer un bénéfice: il n’y aura aucun cadeau en fin du bail emphytéotique.
  • Les clauses de reconductions automatiques du droit d’emphytéose pour le faire survivre à l’issue des 99 ans ne sont jamais valides: la parole d’un vendeur ou agent immobilier garantissant le renouvellement automatique du bail emphytéotique comme s’il s’agissait d’une formalité n’est que du vent.
  • Un appartement bâti sur un morceau du terrain avec emphytéose doit générer une diminution du coût global: le prix d’achat total doit donc être moindre que celui d’un appartement identique en plein propriété. Il faut donc bien calculer les coûts.
  • Le montant du canon ou de la redevance annuelle est lié à la valeur du terrain mais aussi aux charges que certains tréfonciers ajoutent en plus au contrat de bail emphytéotique et qu’ils gèrent parfois eux-mêmes: fourniture d’une énergie, entretien des abords de la propriété, infrastructure…Quoi de mieux en effet: leurs clients leur seront fidèles 99 ans !
  • Plus un immeuble comporte d’étages, plus la quotité de terrain qui est attaché à l’acquisition d’un appartement est faible. La part du terrain étant fort réduite, la différence de prix au niveau de son achat n’est pas déterminante ; une optimisation fiscale d’une dizaine de milliers d’euros lors de l’achat n’est vraiment pas avantageuse si le prix de vente de l’appartement est gonflé ou surévalué. C’est d’autant plus vrai que ce petit bout de terrain va décapiter votre investissement 99 ans plus tard…
  • En cas de revente d’un appartement avec emphytéose, le vendeur n’a pas le  droit de propriété complet. Le nouvel futur  acheteur doit accepter de continuer cette logique de bail emphytéotique, ce qui réduit le panel d’amateurs. Au lieu de se valoriser quelque peu, la valeur de l’appartement se déprécie ainsi de plus en plus au fil du temps. La durée de propriété restante diminue chaque année et le bien est moins attractif. Pour  couvrir ses vieux jours, le propriétaire de cet appartement rencontrera des difficultés  à actionner une vente en viager.
  • La législation sur le bail emphytéotique n’a pas été fondamentalement revue chez nous et la jurisprudence reste vague sur de nombreux aspects. Le cadre fiscal peut considérablement évoluer. Les démembrements artificiels de propriété sont toujours dans l’œil du fisc et peuvent être remis en cause (songeons aux diverses positions de l’administration fiscale relativement aux mécanismes usufruit/nue-propriété).

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Le bail emphytéotique reste une formule utile pour un particulier par exemple si elle  lui permet de se loger à proximité de son lieu de travail, de s’installer dans un lieu déterminé où c’est la seule option, ou de bénéficier d’une résidence secondaire dans un cadre choisi.

S’engager dans cette voie lourde doit inciter à prendre préalablement avant tout accord ou signature, les conseils d’un notaire ou d’un juriste chevronné pour ne pas se tromper d’objectif, ni sur la nature exacte de la vente et du bail emphytéotique. L’analyse des conséquences civiles et fiscales varie selon la situation individuelle de chaque acheteur et la rédaction des contrats doit être particulièrement soignée.

Le terme d’un bail emphytéotique d’un terrain avec construction ? (2)

Le contrat de bail emphytéotique ne peut pas contenir une clause de renouvellement qui permettrait à l’emphytéose de survivre à l’issue des 99 ans.

 

Ce n’est donc qu’après l’expiration des 99 ans que le choix du tréfoncier se fera: aucune promesse ne vaut.

  •  Soit un nouveau bail emphytéotique est concédé ;
  • Soit le bail emphytéotique arrive à échéance et se dénoue selon ces voies:

– le bail emphytéotique n’avait rien prévu et l’immeuble à appartements devient la propriété du tréfoncier, améliorations et transformations comprises.
Souvent le bail prévoit  expressément cette remise de la construction sans indemnité au tréfoncier: le bâtiment a été maintenu en parfait état. Le tréfoncier finit par devenir propriétaire du bâtiment dans des conditions fiscalement intéressantes pour lui;

–  le bail a prévu une certaine indemnisation pour la remise du bâtiment. Mieux vaut que la méthode de calcul soit définie exactement dans le contrat initial (prix coûtant, prix du marché ou autres paramètres…);

– le bail peut même prévoir une clause de «nivellement  c’est-à-dire la remise du terrain au tréfoncier, après démolition des aménagements ou constructions.
 

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Sur la place d’Arona (Italie). Le bail emphytéotique peut s’avérer au fil du temps un véritable boulet pour le particulier qui avait en vue une acquisition en pleine propriété…

 

 

 

 

Le bail emphytéotique a été utilisé le plus souvent par des pouvoirs locaux ou des institutions en vue de favoriser la création des logements collectifs ou de valoriser une zone avec  des résidences secondaires par exemple. Recourir au bail emphytéotique permettait de conserver un contrôle public de l’urbanisation et était un instrument intéressant de politique foncière: le prix du terrain ne grevait pas le budget des emphytéotes, en cas de construction. Dès lors qu’il représente un certain pourcentage des coûts de la construction (en moyenne à peu près 30% pour des maisons individuelles par exemple), cela peut d’avérer un bon deal.

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Pour les sociétés commerciales, la formule emphytéotique s’avère très rentable quelle que soit leur position, tréfoncières ou emphythéotes. Tréfoncières, bénéficiant de services juridiques de pointe, elles n’ont pas le rôle de sauvegarde du bien collectif et recherchent l’opération financière juteuse à long terme.

Le particulier qui contracte avec une société commerciale tréfoncière doit, dans cette configuration, être plus que sourcilleux sur les termes du contrat.

Vu les plus grands avantages fiscaux  pour les sociétés ou les commerces, devenir emphythéotes en raison de la possibilité de s’établir sur un emplacement porteur ou prisé est aussi un choix pertinent. Les administrateurs ou commerçants resteront attentifs à la présence éventuelle d’une clause dans le contrat de bail emphytéotique permettant la résolution de plein droit du droit d’emphytéose en cas de faillite, d’une procédure d’insolvabilité,  ou de dissolution de l’emphytéote personne morale, ce qui les ruinerait totalement.

(A suivre)

Emphytéose et achat d’appartement à Bruxelles ? (1)

L’achat d’un appartement provient souvent du désir de l’acheteur d’échapper au carcan locatif pour avoir un droit de propriété complet lui permettant de jouir d’un bien et d’en disposer sans restriction (occupation personnelle, location, vente …) 

Je viens de me rendre récemment sur un chantier de mise en vente d’appartements à Bruxelles où l’acheteur n’aura pas ce droit complet de propriété sur l’appartement acheté. C’est parfaitement possible et légal. Ce qui est plus surprenant, c’est que cet élément, majeur à mon sens, de la vente n’était pas indiqué aux amateurs. La documentation fournie sur place ne mentionne pas que le terrain où l’immeuble à appartements sera bâti est concédé aux futurs acquéreurs d’appartements sous le régime de bail emphytéotique. Or, il s’agirait bien d’une vente d’appartement couplée à une emphytéose partielle, celle du terrain.

Qu’est-ce que l’emphytéose? Non pas une maladie mais une vieille formule juridique prisée à l’étranger, utilisée chez nous depuis longtemps (Le Coq, Louvain-La-Neuve..). Ce mécanisme juridique peut avoir des aspects intéressants. Mais le particulier doit bien en cerner les aspects mécanisme car l’emphythéose peut se révéler aussi invalidante que l’arthrose.

La loi du 10 janvier 1824 définit le droit d’emphytéote comme «un droit réel, qui consiste à avoir la pleine jouissance d’un immeuble appartenant à autrui, sous la condition de lui payer une redevance annuelle, soit en argent, soit en nature, et cela en reconnaissance de son droit de propriété ». L’emphytéose ne peut être concédée pour un terme inférieur à 27 ans et supérieur à 99 ans (article 2, loi du 10 janvier 1824). Cette disposition est impérative, on ne peut donc y déroger.

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Le bail emphytéotique apparu sous l’Empire romain permettait de  valoriser des immeubles ruraux, grâce sa longue durée et aux prérogatives de l’emphytéote plus étendues que celles d’un simple locataire. 

Dans ce système, le droit de propriété est démembré et partagé entre un emphytéote qui possède le droit de jouissance sur le bien de la manière la plus étendue, et le propriétaire du bien qu’on appelle le tréfoncier qui reçoit en contrepartie une redevance annuelle, appelée canon emphytéotique.  

L’emphytéote est tenu d’entretenir correctement le bien immobilier, d’effectuer les travaux de réparation et de payer toutes les charges.

Suivant la tradition, le montant  du canon pouvait être inférieur au revenu réel du bien ou fixé en fonction du revenu annuel. Dans le cadre d’une acquisition d’un appartement avec emphytéose, la redevance canon actuelle est déterminée par la taille et l’emplacement de l’appartement.

( A suivre).

Prorogation de bail en raison du grand âge (3).

Outre les pistes déjà évoquées, il reste une dernière possibilité au locataire senior de conserver sa location un peu plus longtemps, en demandant à son propriétaire une prorogation de son bail.

En effet, chaque locataire arrivé en fin de bail et à qui le congé a été valablement notifié peut toujours, en cas de circonstances exceptionnelles, demander une prorogation de son bail (au plus tard un mois avant l’expiration du bail et par lettre recommandée).

En cas de désaccord, le locataire peut demander la prorogation au juge de paix.

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C’est le juge de paix qui est le seul maître du jeu et qui détermine si les circonstances sont assez exceptionnelles pour proroger le bail.

Le juge de paix tient compte à la fois de l’intérêt du bailleur et locataire. Si le juge octroie la prorogation, il peut également accorder au bailleur une augmentation du loyer et  réduire l’indemnité due éventuellement par le bailleur. Le juge fixe alors la durée de la prorogation et précise une date de fin de bail.

A la fin de cette première prorogation, le locataire peut redemander  un second délai de prorogation s’il peut faire valoir de nouvelles circonstances exceptionnelles valables.

Est-ce que le grand âge est une circonstance exceptionnelle?

C’est une question d’appréciation. Certains juges estiment qu’en lui-même, l’âge avancé constitue la circonstance exceptionnelle. D’autres juristes estiment que le grand âge donne un caractère exceptionnel à d’autres faits comme d’éventuels problèmes de santé, qui cumulés deviendront des circonstances exceptionnelles justifiant la prorogation d’un bail.

A ce propos, deux observations sociologiques peuvent être faites.

  • L’allongement général de la vie fait que le processus de vieillissement n’est plus intrinsèquement exceptionnel, puisqu’il est reconnu, répandu et largement prévisible.
  • Les problèmes de santé et la polypathologie dès 75 ans concernent de nombreux seniors+: ils sont donc loin d’avoir ce caractère exceptionnel.

A l’avenir, les droits de certains propriétaires pourraient se trouver très amoindris face à la toute-puissance naturelle du grand âge de nombreux locataires ** et ils pourraient hésiter à louer aux personnes âgées, comme en France. Ce qui s’avère une protection pour certains seniors installés comme locataires pourrait devenir un boulet pour les seniors qui cherchent à louer.

La question du grand âge en matière locative se révèle, actuellement, chez nous, très délicate à juger et se règle au cas par cas, un peu comme les discriminations de l’âge à l’embauche**. Toutes les hésitations des juges en cette matière sont traduites et perceptibles dans la jurisprudence belge, ce qui ne rassurera certainement pas Albert et Marie.

 

 *Le problème de la location pour les seniors+ ne peut que s’aiguiser. En Belgique, le taux de propriétaires dans la tranche d’âge de la cinquantaine serait actuellement de 80 %. Or, dans toute l’Europe, le nombre de personnes de plus de 65 ans va doubler dans les cinquante ans à venir. Le cas des locataires seniors+ en difficulté seront loin d’être isolés.

**L’âge plus que jamais source de discrimination.  Références « Le Soir Emploi » 04/06/2016

Locataire en Belgique et protection de la personne âgée (2).

En France, la loi Macron vient de renforcer la protection existante du locataire âgé de plus de 65 ans, avec des ressources faibles: le propriétaire ne peut pas s’opposer au renouvellement du bail, sauf s’il trouve lui-même un logement de remplacement pour son locataire âgé.

Les locataires seniors sont donc bien protégés en France. La conséquence est qu’en France, les propriétaires hésitent maintenant  à louer aux seniors à revenus normaux ou modestes de peur de voir immobiliser leur bien pour une période indéfinie.) L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 autorise aussi une personne âgée d’au moins 60 ans et dont l’état de santé justifie un changement de domicile à ne pas respecter un préavis de trois mois mais d’un mois seulement.

Quelles sont les règles applicables en Belgique concernant la location d’un immeuble aux seniors?

Aucune protection légale particulière n’existe chez nous en faveur des locataires seniors.

Les règles juridiques habituelles valent.

  • Il ne peut y avoir une discrimination envers le candidat locataire en fonction de son âge: un propriétaire, de même que son agent immobilier, ne peuvent faire preuve de discrimination dans le choix du locataire en fonction de son âge. Refuser un locataire âgé n’est pas permis s’il n’y pas d’autre justification objective. Inversement, un propriétaire qui ayant  connu des problèmes avec ses locataires précédents, un couple jeune avec des enfants, ferait une discrimination s’il marque sa préférence sur base de l’âge en choisissant comme critère de candidats locataires «un couple âgé».

  • La vente (ou la donation) d’une maison ne signifie pas la fin d’un contrat de bail. S’il a été enregistré, le bail enregistré est opposable aux tiers: le locataire bénéficie d’une protection contre l’expulsion par le nouveau propriétaire-bailleur: ce dernier sera tenu  de suivre ce contrat de bail. Pour le vendeur,le prix d’un logement vendu occupé est cependant impacté à la baisse suivant le temps restant à courir pour le bail, le montant correct ou non du loyer et l’âge du locataire qui pourrait aussi demander en justice une prolongation exceptionnelle de son bail. J’y reviendrai.

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Avenue de la Houlette à Auderghem: lieu de l’implantation future de la première résidence-services publique

Quelles sont les portes à activer anticipativement par un locataire quand le grand âge est à l’horizon ?

  • Dans certains cas, négocier un bail de longue durée ou à vie avec son propriétaire est envisageable. Quand un locataire occupe le bien depuis des décennies sans souci pour son propriétaire, peut-être senior aussi ou sans héritier direct, le locataire peut tenter la négociation d’un bail de longue durée ou à vie. Un contrat de bail peut être conclu pour une durée allant  soit jusqu’au jour du décès du locataire ou jusqu’au jour de son transfert définitif en maison de repos. Cela donne au locataire la certitude de ne pas devoir quitter abruptement le logement mais l’oblige aussi à rester locataire de ce bien. Le propriétaire y gagnera une certaine tranquillité d’esprit et des revenus assurés. Ce bail doit être notarié: les conseils éclairés d’un juriste sont indispensables pour une négociation équitable tenant compte de l’intérêt des deux parties. Le propriétaire ne doit pas être dépossédé ou privé d’une augmentation légale de loyer par exemple.
  • Prévoir dans le bail ce qui arrive en cas de décès du locataire peut rassurer un propriétaire. Le décès du bailleur ou du locataire ne met pas fin au contrat de bail. Les héritiers, soit du bailleur, soit du locataire, sont donc tenus de poursuivre le bail en cours et ne peuvent y mettre fin qu’en respectant les conditions De nombreux propriétaires se sont retrouvés coincés durant des mois, empêtrés dans des procédures judiciaires aléatoires avec l’impossibilité de relouer si la succession est nébuleuse. Le risque devient plus acceptable si une disposition du  bail prévoit  que celui-ci prend fin automatiquement, ou après un délai relativement court (par exemple de 1 à 3 mois) après le décès du locataire.
  •  Les seniors qui remplissent les conditions sociales requises peuvent envisager de demander l’attribution d’un logement social, un  secteur malheureusement en crise et de qualité très inégale. Acceptés, ils bénéficieront d’une meilleure stabilité locative. L’âge n’est pas un critère déterminant dans l’attribution des logements sociaux même s’il peut donner un point de priorité. Une fois installé dans un logement social pour autant que l’espace loué reste proportionné à l’occupation effective, le locataire senior a moins de risque de devoir déménager (sauf rénovation). Si un déménagement s’imposait, le senior serait aussi  guidé par la société de logement ou le CPAS  vers une solution adaptée.
  • Se tourner vers de nouvelles solutions gérées par le secteur public là où c’est possible. Ainsi la forme de résidence-service** sociale est née pour ces seniors non propriétaires qui n’ont pas besoin de l’encadrement d’une maison de repos. Saluons à Bruxelles l’initiative d’Auderghem qui va construire la première résidence-services publique avec des conditions d’accès identiques à celles du logement social. Le rez-de-chaussée de ce futur bâtiment qui sera ouvert en 2018 accueillera des locaux pour les kinésithérapeutes, les médecins et les infirmières, des bureaux pour les assistantes sociales du CPAS, un deuxième restaurant social auderghemois disponible pour les habitants du quartier. Les résidents auront aussi accès au système de télévigilance.

 *La loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination distingue les discriminations directe et indirecte.

Il y a discrimination directe si une différence de traitement qui manque de justification objective et raisonnable est directement fondée sur le sexe, une prétendue race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, la fortune, l’âge, la conviction religieuse ou philosophique, l’état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique .

Il y a discrimination indirecte lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre a en tant que tel un résultat dommageable pour des personnes auxquelles s’applique un des motifs de discrimination directe, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne repose sur une justification objective et raisonnable.

 **Le concept de base d’une résidence-service est un ensemble immobilier de logements destinés aux personnes âgées de plus de 60 ans leur permettant de mener une vie autonome et disposant de services auxquels elles peuvent faire appel. Les services, l’exploitation, les aspects juridiques, les coûts diffèrent selon que l’initiative est privée ou publique.

Personne âgée locataire en Belgique ? (1)

Un juriste averti peine parfois à donner une réponse rassurante.

Voici deux seniors+ aux prises avec des problèmes locatifs:

  • Albert a 89 ans et loue une maison depuis plusieurs décennies. Son propriétaire, sans héritier direct, vient de décéder. Le bail d’Albert arrive à expiration. Que vont faire les héritiers? Pourra-t-il demander une prorogation du bail?
  • La maison de Marie 80 ans dont elle était une copropriétaire très minoritaire vient d’être vendue. Elle s’étonne de ne pas trouver facilement un bien à relouer «alors qu’elle a encore toute sa tête» et ne veut pas aller dans un home…

Quand ils envisagent de se loger via une location, les raisons des candidats locataires peuvent être fort différentes: un capital de départ insuffisant pour un achat immobilier, un désir de liberté, un choix de ne pas s’impliquer dans le gros entretien d’une maison, une situation temporaire avant achat futur, une attente de consolidation d’une situation,  les circonstances défavorables de la vie (crise économique, perte de revenus, séparation, malchance…).

En étant locataire, le risque de devoir changer de logement existe. C’est un inconvénient connu dès le départ et qui persistera.

Au fil des décennies, ce qui était une liberté ou une facilité hier quand on est jeune ne l’est plus pour un locataire devenu senior +.

Plus on avance en âge, plus problématique est le changement de logement, de quartier parfois même de ville. L’aspect pratique devient mineur face au  retentissement * et au déchirement émotionnels. Les murs d’une habitation sont aussi les témoins de notre vie car ils abritent notre histoire avec les instants de bonheur, d’espoir, de tristesse ou conflit. Ce sont souvent des lieux très précieux auxquelles se rattachent nos souvenirs. On n’oublie pas la maison de son enfance…

 « C’est seulement à l’instant de les quitter que l’on mesure son attachement à un lieu, une maison, ou à sa famille ».  

Eric Cantona Sportif

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                                                                                                                                                                           Village autrichien

Pour le locataire senior, louer ne lui permettra pas d’investir pour des aménagements coûteux liés à la grande dépendance, qui transforment souvent profondément l’espace.

Pour le propriétaire, louer à des seniors + dans un marché immobilier tendu peut présenter l’atout de la sécurité des revenus mais il attend aussi l’entretien minimum et habituel de son bien sans devoir être dérangé constamment pour tous les petits tracas de gestion incombant naturellement au locataire.

Exemple : Lors d’une visite de candidats locataires pour un bien rural, une maison avec un grand jardin, les candidats âgés disent au propriétaire âgé. «Nous, le jardin, on ne le fera pas. Mon mari a mal au dos et moi, je ne peux plus me baisser ». Le propriétaire avait lui dépensé plus de mille € pour procéder à la remise en ordre de ce jardin…

Un certain équilibre doit être conservé entre les parties au contrat de location et un particulier ne peut suppléer aux difficultés permanentes ou sociales des locataires.

Notre droit prévoit-il des mesures de protection locative pour les grands seniors?

Notre maison est comme un corps extérieur qui cristallise toutes nos émotions. C’est pour cela qu’en avançant en âge, on n’aime pas que les choses changent, il y a un ordre qui correspond à notre structure mentale. Déménager, c’est remettre tout en question ».