La Belgique peut-elle se rêver en bleu, en Blue Zone ?
On nous dit que nous vivrons vieux en Belgique. Sans doute.
Mais dans quelles conditions ?
L’âge de la retraite est porté à 67 ans en 2030. Le problème est que notre espérance de vie en bonne santé et sans incapacité est de 65 ans.
La perspective de vivre jusqu’à 100 ans soulève donc un optimisme à tempérer, comme le montrait une analyse pointue de Sylvie Simon (1). Nos propres centenaires actuels ont bénéficié dans leur jeunesse de facteurs largement favorables à la longévité: peu de pollution, nourriture plus saine, activités physiques plus intenses dans les déplacements (marche,vélo…).
Les 6 facteurs favorables à une longévité agréable relevés dans les Blue Zones apparaissent dans notre pays viciés et dans le rouge. Notre alimentation ? Nous ne savons plus bien ce que nous mangeons. Non seulement beaucoup de produits sont transformés avec de multiples additifs mais ils contiennent beaucoup trop de sucres. Même les aliments non transformés comme les fruits et légumes posent problème car leur concentration en nutriments a chuté drastiquement depuis 1950 (2).
L’analyse des conditions de vie révèle un tableau bien différent pour la population née après la seconde guerre mondiale.
Blue Zone |
Belgique 2015 |
Sobriété | Obésité, addictions… |
Sérénité | Stress, incertitudes… |
Exercice physique régulier |
Sédentarité. |
Zone aérée et ensoleillée | Climat gris, pluvieux. Pollution. |
Alimentation à base de légumes et des fruits | Alimentation transformée, industrielle, avec beaucoup de viande |
Vie sociale active, communautaire, proche de la famille et des amis. | Vie isolée, ou de type « cocon », famille de type nucléaire ou monoparentale. |
En Belgique, la population vieillit effectivement .
Mais notre pays ne sera pas une Blue Zone. Ni un port de longévité tranquille avec un ciel d’azur où le vieillissement s’effectuera en bonne santé et où nous vivrons tous entourés de nos amis très âgés.
A partir de 65 ans, de nombreux patients de notre pays cumulent déjà une série de pathologies différentes, chroniques et complexes. A présent, «90% des personnes âgées sont sous médicaments» (3) alors que les centenaires des Blue Zones ont peu recours à la médecin chimique.
La population belge née après la seconde guerre mondiale n’aura pas les mêmes jokers que la génération précédente qui eut un mode de vie proche des piliers de longévité des Blue Zones.
Les futurs seniors ne pourront tous éviter les maladies ou dégradations du corps, de l’esprit, du souffle et la solitude. A la conjonction des facteurs défavorables relevés dans le tableau de comparaison ci-dessus, il faut ajouter l’impact négatif d’une mobilité «nécessaire», de la diminution du montant des retraites ou des allocations publiques, de la commercialisation croissante des soins de santé. Une dépendance même minime nous rend dépendants de l’industrie médico-pharmaceutique.
Dès lors, comprendre que les années de vie gagnées en autonomie ou en relative santé sont capitales pour naviguer sereins, devient non seulement un enjeu de santé publique mais notre défi personnel.(4)
1. Vivons- nous plus vieux. Sylvie Simon Nexus 74/ mai-juin 2011.
2. Journal le Soir du 28 janvier 2015 , page 19
3. Vivons- nous plus vieux. Sylvie Simon Nexus 74 / mai-juin 2011.
4 «Il convient de rappeler que la prévention commence à la naissance et se poursuit jusqu’à la fin de vie,intégrant la prévention primaire, secondaire et tertiaire. Elle s’inscrit dans une logique qui comprend la prévention de la perte d’autonomie, mais aussi dans tout le parcours de vie des personnes dont chaque étape offre des opportunités pour en saisir les moments clés: maladie, isolement, prise de conscience,ruptures». Rapport « Anticiper pour une autonomie préservée : un enjeu de société » du Dr Jean-Pierre Aquino. 2013.