Son père est mort et sa mère exerce son despotisme dans sa chambre de pensionnaire à la Séniorie des Dunes. La narratrice regarde les voiliers qui glissent en silence sur la mer.
Autour des années soixante, entre la Mer du Nord et Bruxelles, la mère formait alors avec son mari un couple bourgeois qui sauvait les apparences et ignorait leur fille, la narratrice. Le père amoureux de voile faisait des remontrances continuelles, la mère méprisait sa fille, ne lui offrant pas un regard. Dans l’indifférence, la fille est violée par son fiancé.
La narratrice tente d’exister malgré tout, avec un faux détachement. Ces comportements parentaux toxiques, répétitifs l’ont brisée. Elle n’a plus confiance dans la vie et recherche encore une impossible validation auprès de sa mère âgée.
Dressing moderne
L’auteur
Néeen 1946, Corinne Hoex est licenciée en histoire de l’art. Depuis 2001, elle a publié de nombreux ouvrages, des romans et de la poésie. En 2008, paraît son roman « Ma Robe n’est pas froissée » et en 2010 le roman « Décidément je t’assassine » qui a obtenu le Prix Marcel Thiry.
Sur la vieillesse
Les intervenants, les professionnels des maisons de repos ne découvrent le résident qu’au moment précis de son entrée. Le pensionnaire peut présenter un autre visage dû à sa vulnérabilité, une image lissée comme un beau meuble rempli de souvenirs. La famille connaît la personnalité antérieure, bâtie sur les interactions entre elle, les proches et la société. Le personnel des homes est conscient que quelques résidents ont, par leur comportement passé, éloigné la famille ou ont conduit des enfants à prendre légitimement assez de distance pour construire leur vie.
Pour la narratrice, l’abandon où elle a été plongée est encore plus cruel. Car il s’agit d’une fille unique qui assume encore les visites à sa mère dans son home: « Je m’acquitte de mes réparties avec une conviction manifeste, un dévouement exemplaire », page 50.
Le récit de la maltraitance, de ce manque primordial d’amour parental est glaçant d’autant que tout se passe dans le silence. La conséquence pathétique du comportement parental déshumanisé est que la narratrice n’a pas pu se construire, qu’elle n’a pas d’existence réelle et qu’elle est toujours en quête d’attention maternelle malgré les humiliations constantes que lui inflige encore la vieille dame.
La description des faits est quasi clinique : des phrases courtes et un vocabulaire très précis. Le récit court est poignant.
Un passage…
« Chaque semaine quand je lui rends visite, mon irruption dans sa chambre insulte sa liberté. Lorsque selon l’usage, je me penche vers elle pour l’embrasser, ses épaules se dressent, sa nuque se raidit, ses lèvres se rétractent, tout son corps se soustrait au venin de mon baiser », page 75.
Ma robe n’est pas froissée. Corinne Hoex. Editions : Les impressions nouvelles