Le bénévolat dans les orties

Le désintéressement solidaire vole en éclat. Les associations peinent à recruter des bénévoles ou volontaires qui  donnent du temps et de l’énergie pour les autres.

Un récent reportage TV en Suisse romande illustrait l’évolution  des mentalités en matière de bénévolat.

Un responsable  y relevait que peu de personnes acceptent encore d’être bénévoles sans rétribution financière.

D’autre part, ce responsable-bénévole déçu, évoquait ce paradoxe: les individus demandent de plus en plus de services à la société et aux associations alors qu’en même temps  ils rechignent à s’investir bénévolement, à « donner d’eux » sans contrepartie financière.

Cette évolution conduit à la mort assurée des sociétés dans les villages ou villes comme les sociétés musicales (fanfares,…) ou sportives (clubs de foots, …).

Sans engagement convaincu de bénévoles, les structures des associations se vident petit à petit, puis s’éteignent tuant le lien social. Même les parents sont peu mobilisés dans les clubs ou groupements qui ont besoin de bénévoles pour les activités de leurs enfants.

Certes, on trouve toujours des bénévoles pour des activités ponctuelles concrètes de première nécessité comme la restauration d’urgence, les plans catastrophes, les grandes campagnes télévisuelles ou les causes altruistes durant les fêtes de fin d’année. Des secteurs restent attractifs pour les volontaires  notamment les associations culturelles ou artistiques.

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La crise du bénévolat n’est pas un vain mot.

La société a changé. L’individualisme va de pair avec la marchandisation galopante du monde. Le temps, c’est de l’argent: tout se vend, s’achète, et se paie.

Dans ce champ d’orties, le bénévole lui agit en total décalage: il s’investit quotidiennement au sein d’une association,  assume même des responsabilités et n’en retire aucun profit ou reconnaissance excepté éventuellement une satisfaction personnelle.

Mais au fil du temps de son engagement, il peut vite se désoler du manque de moyens pour exercer sa mission, peiner à côté de travailleurs qui dans certains mouvements lui font sentir leur supériorité ou l’exploite, pâtir des consommateurs qui lui reprochent son incompétence, son manque de responsabilité, son engagement. Eh oui ! César, entraîneur bénévole de football n’a plus supporté de voir ses décisions, sa compétence même systématiquement décrédibilisés par les parents de son équipe de minimes. Madeleine, visiteuse bénévole de malades dans un hôpital a vu son rôle se transformer et s’intégrer dans la chaîne du  travail de l’hôpital. Elle devait amener à un rythme soutenu les patients aux salles examens sans plus aucune possibilité de tisser un lien avec eux et parfois en subissant les reproches d’infirmières ou de médecins pour des retards dans les transferts. Elle a stoppé net cette activité.

La plainte récurrente des bénévoles démotivés concerne quasi toujours le manque de considération et de respect de leur personne et de leurs actions. 

En outre, de nombreux bénévoles assument leurs frais de déplacement si pas plus (cotisations, achats de partitions, confections d’articles, frais postaux…). Les organisations n’ont aucune obligation légale concernant le remboursement des frais exposés par les volontaires.

Certains bénévoles ou volontaires* finissent légitimement par se lasser et renoncent.

Sans bénévolat, certains services à la population disparaîtront tout simplement.

Pour survivre, le service bénévole s’orientera vraisemblablement vers une logique en phase avec la société de donnant-donnant, en indemnisant les frais de base des individus volontaires, en leur proposant des collaborations ou activités directement valorisantes pour leur personne en termes de développement personnel, d’estime de soi ou de loisir et ce, pour une durée d’engagement limitée et définie au préalable (une période renouvelable de 2 ans). Certains mouvements ont réalistement anticipé les choses. Dans un groupement qui accueille les familles endeuillées après les cérémonies, Danielle, veuve, a trouvé sa place. Ses déplacements sont remboursés et l’activité  indemnisée de manière minime lui permet de rencontrer beaucoup de monde. Henri chante dans une chorale qui rehausse certaines cérémonies: son uniforme, ses déplacements sont pris en charge et il a l’occasion quelques fois par an de faire des petits déplacements dans des coins inattendus.


*La loi sur le statut du volontaire (loi du 3 juillet 2005 entrée en vigueur le 6 février 2006) définit précisément le volontariat. En bref, il s’agit de toute activité exercée sans rétribution ni obligation au profit d’autres personnes ou de la collectivité, dans une organisation, en dehors du contexte normal du travail.