Le concept de l’autonomie s’est développé depuis trois décennies dans le monde des seniors.
La génération (*) née entre les deux guerres (1922-1942) s’en est emparée comme un fanion. Certains agitent ce fameux plafond de verre d’autonomie pour ne pas trop entacher leur image narcissique.
Marqués par la guerre, un choix de vie restreint et un idéal de loyauté, les seniors nés dans l’entre deux-guerres ont connu un milieu relativement stable et favorable à la longévité actuelle: un travail en entreprise rémunéré en salaire et en avantages sociaux garantis, pas de délocalisation géographique majeure, une nourriture saine non industrialisée et une absence de pollution dans leur écosystème durant longtemps. Ils ont une résistance physique meilleure que celle de leurs parents car ils bénéficient des récentes avancées médicales. Ils ont compris aussi qu’une prise en charge familiale est un élément fondamental de stabilité pour vivre vieux et en bonne santé.
Vu leur pouvoir d’achat, une puissante vague médiatique et commerciale positive bombarde ces seniors de références de superseniors fringants, bien conservés et surtout autonoOOOmes qui profitent aussi longtemps que possible de la vie, à l’écart des maisons de retraite. Ils peuvent pallier tous les soucis de l’âge. Cette société idyllique de seniors vantée dans le discours mercantile oblige d’autres seniors dépendants à refouler leur expression de malaise. La « story publicitaire » des seniors aisés crée parfois le ressentiment des plus jeunes en difficulté, qui voient ces images paradisiaques des croisières seniors: comment comprendre ce grand-père qui ne bouge pas?
Fallas museum. Valence.
En effet, sur le terrain, la réalité des seniors + n’est pas si homogène ni conforme aux messages du marketing. Avec le développement fulgurant des résidences services dans notre pays, on constate que des établissements peinent à trouver leur public cible, soit les personnes vraiment autonomes. Certaines résidences sont à mi-chemin entre des maisons de repos et des zones secondaires de revalidation. Dans d’autres domaines, on est obligé d’habiller l’autonomie vantée des seniors, en l’encadrant, en la connectant, en la garantissant, en l’assurant même!
* Classer les personnes dans des classes générationnelles permet de mieux analyser les données du problème mais gardons à l’esprit que les êtres humains échappent souvent à ces classifications…